Noir Jaune Blues, le Belge sous la loupe !

Début 2023 paraît une enquête qui donne le ton pour cette nouvelle année. Elle risque de confirmer un état d’esprit commun : pourvu que cette année soit moins pire que la précédente !

Eh bien, non ! La Fondation Ceci n’est pas une crise[1] a mandaté un bureau de recherche[2] afin de mettre en lumière les états d’âme de l’homme belge sur son pays, la Belgique. Faire l’état des lieux de sa société est intéressant, non pas pour chiffrer un ensemble de données, mais plutôt pour y apporter quelques solutions ou au moins quelques pistes de réflexions. Aussi, cela permet aux grandes institutions de notre pays d’avoir une autre approche bien plus réelle sur la vie « difficile » du Belge. Le constat est clair : le Belge a le blues[3] !

Le monde que nous avons créé est un produit de notre pensée, nous ne pouvons pas le changer sans changer notre façon de penser

Albert Einstein

Lors de l’enquête[5], le contexte sociétal était particulier. En effet, elle a été réalisée en 3 temps : février 2020, octobre 2020 et juillet 2022. Ce qui correspond à la période juste avant la pandémie du covid19, les confinements et l’incertitude de sortir de cette crise sanitaire, l’invasion russe en Ukraine avec ses dommages collatéraux (flambées des prix, inflation) et les évènements climatiques (sècheresses, …). Deux courants se distinguent : ceux qui veulent une retribalisation (52%) et ceux qui veulent une ouverture de la société. Cela signifie que 1 Belge sur 2 veut le repli sur soi et précisément sur sa propre ethnie: « Les institutions sont délégitimées, les valeurs-ciment s’effritent, l’individu est soumis à diverses dominations avec un sentiment d’une faible capacité à agir, ce vécu de victimes fait que la peur domine »[6] analyse Benoit Scheuer, fondateur du bureau de recherche Survay And Action.

Ce sont les inégalités sociales qui sont le moteur de cette peur envahissante. En effet, 63% des Belges estiment que les dirigeants politiques actuels n’ont plus les capacités ( ¼ des richesses du pays est détenu par 1% de la population : le riche donne le tempo à la politique) pour améliorer nos vies quotidiennes et que nous assistons à un effondrement du système. En d’autres mots, l’Etat est dans une optique d’intérêt personnel au lieu de l’intérêt commun de ses concitoyens belges. Une rupture s’amorce ! Cependant, le plus troublant des résultats est ce 66% des Belges qui veulent un pouvoir fort, un pouvoir autoritaire !

Quand tout le monde vous ment en permanence, le résultat n’est pas que vous croyez ces mensonges mais que plus personne ne croit plus rien. Un peuple qui ne peut plus rien croire ne peut se faire une opinion. Il est privé non seulement de sa capacité d’agir mais aussi de sa capacité de penser et de juger. Et avec un tel peuple vous pouvez faire ce que vous voulez.

Hannah Arendt

Notre démocratie est en danger et ce sont les inégalités sociales qui la menacent fortement. Nous vivons un moment de bascule dans l’Histoire de l’humanité. De nos jours certains pays continuent sous ce genre de régime autoritaire et nous savons tous que ce n’est pas la voix à suivre car l’Histoire regorge d’évènements qui ont entraîné le monde vers des dictatures sans nom. D’ailleurs, l’Histoire nous prouve que tout a commencé par une gouvernance autoritaire qui a engendré par la suite une dictature. Conséquence de ce sentiment d’abandon, le Belge moyen s’est trouvé une victime, un bouc émissaire : l’étranger. Bref, l’histoire se répète tristement…

« L’appel à la retribalisation est essentiellement motivé par le besoin de protection… il est indispensable de montrer que le projet « fonder des sociétés ouvertes » peut être une protection face aux nombreux périls et que les gouvernances autoritaires, contrairement à ce qu’elles promettent, ne protègent pas ! (…) D’abord, adopter une attitude d’écoute face à la population pour tenter d’endiguer la fascination pour la retribalisation (…) et développer la démocratie narrative et participative pour bâtir un récit collectif mobilisateur positif. Pour passer un cap, seule une projection dans le futur permet de rester mobilisé. Donc une perspective à moyen et long terme. Sans la description, la perspective et la capacité à se projeter dans un avenir désirable, inspirant, aucune mobilisation pour l’aspiration à fonder des sociétés ouvertes ne sera possible. « Cela peut être mieux demain » versus « tout s’effondre »[8]

Refaire une société saine relève du défi ! Cependant, nous pouvons choisir une autre voix : le rassemblement de l’horizontal (le peuple) et du vertical (le pouvoir) afin de construire un cercle vertueux de confiance entre ces 2 entités. En bref, penser la politique et les projets à partir « d’en bas » et créer du désir d’agir ensemble. 

« Changer de gouvernance. Innover. Développer la démocratie narrative et participative. Aborder les défis actuels ne sera possible que si l’on retrouve une qualité de débats avec une distance critique, pas des polémiques sur des détails. C’est la façon dont on va trouver des « solutions », des programmes d’actions et des mesures qui créeront des désirs d’adhésion à l’aspiration à la fondation de sociétés ouvertes. (…)  Il est indispensable de renforcer les Etats et les Services publics dans leurs rôles préventifs, protecteur et régulateur (…) Nécessité d’articuler les trois niveaux : les citoyens, les corps intermédiaires et l’Etat. Une mobilisation générale. »[9]

La devise de la Belgique n’est-elle pas « L’union fait la force » ! Encore faut-il une réelle volonté des politiques et des Belges de prendre cette porte de sortie…

« Un monde sans espoir est irrespirable ”

André Malraux

Najoua


[1] www.cecinestpasunecrise.org- les résultats de l’enquête sont exposer librement sur le site de la fondation.

[2] Equipe de chercheurs : Benoît SCHEUER, Sociologue Concepteur et responsable scientifique de cette recherche, Fondateur et Administrateur délégué de l’institut de recherche en sociologie Survey & Action (00 32) 475 34 57 30 b.scheuer@survey-action.be Vincent SCHELTIENS, Sociologue, historien Université d’Anvers vincent.scheltiens@uantwerpen.be Dominique TREMBLOY, Sociologue Chercheur Survey & Action

[3] Synonymes : le cafard, la nostalgie, la mélancolie.

[4] Physicien allemand du 20ième siècle

[5] 1059 personnes sondées

[6] Article Le Vif express-le 23 janvier 2023 : « l’enquête Noir jaune Blues, 5 ans après : plus d’un belge sur 2 aspire à une gouvernance autoritaire »

[7] Politologue allemande du 20 ième siècle.

[8] Benoit Scheuer, www.cecinestpasunecrise.org

[9] Benoit Scheuer, www.cecinestpasunecrise.org

[10] Ecrivain, homme politique français du 20 ième siècle

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