Lundi 6 février 7h30
J’aperçois à travers la vitre de ma chambre le magnolia qui trône avec grâce et élégance dans le jardin. Les bourgeons se forment déjà. Fidèles au rendez-vous, ils écloront discrètement comme à l’accoutumée pour fleurir au mois de mars. Je les attends chaque année en secret… Ses fleurs délicates au camaïeu de rose sont un plaisir pour les sens et me ravissent chaque printemps.
Soudainement, le camaïeu prend une teinte grisâtre en pensant à leur floraison éphémère… Très vite, ses pétales viendront joncher le sol pour se décomposer et disparaitre dans les entrailles de la Terre. Un vent de mélancolie me traverse alors furtivement. Je reste pensive… Admirative de la nature et de sa perfection, ce n’est pas tant sa beauté qui me laisse sans voix à ce moment précis… Mais le rappel indéniable de la fugacité de notre passage sur Terre. Tels les pétales du magnolia, j’irai rejoindre les entrailles de la Terre aussi…
L’hiver se complait dans nos contrées. Les journées se ressemblent. Je scrute le ciel et esquisse un sourire. Il est d’un bleu azur comme je l’aime en cette saison, annonciateur d’un froid revigorant. Le printemps arrive bientôt… et le magnolia bourgeonne. Je puise dans la contemplation de la nature la force pour m’extirper du lit douillet dans lequel je me prélasse. La journée sera longue.
22h25
Je tire les tentures et entraperçois dans l’obscurité les branches du magnolia. Je repense à ce matin et à la force que j’ai dû déployer pour m’extraire de mon lit douillet.
A quelques milliers de kilomètres, des dizaines de milliers de personnes ne rejoindront pas le lit qu’ils ont quitté ce matin.
Les mots lus au cours de la journée résonnent encore en moi : « Tremblement de terre meurtrier en Turquie et Syrie… Des milliers de personnes restent prisonnières sous les gravats… Des appels à l’aide étouffés parviennent de sous les décombres… Les rescapés sont livrés au froid glacial… Un père de famille pleure la perte de sa femme et de ses 5 enfants… Nous avons besoin de couvertures… ».
Ma main caresse lentement la couette duveteuse, épaisse et chaude qui me recouvre.
Je reste immobile dans le noir… presque honteuse.
Là-bas, les décombres recouvrent les victimes.
Le rappel indéniable de la fugacité de notre passage sur Terre me revient à l’esprit. Tels les pétales du magnolia, ils s’en sont allés rejoindre les entrailles de la Terre…
L’hiver fait rage et la neige parsème les chemins.
Et même si les magnolias fleuriront bientôt, les âmes meurtries ne les verront sans doute pas…
À tou.te.s les orphelin.e.s, les veuf.ve.s, les rescapé.e.s, les victimes, puissiez-vous puiser en Dieu la force pour continuer votre chemin.
L.M.
Tout simplement magnifique ! Machaallah , c est exactement mon ressenti, c est écrit avec raffinement, douceur…. Qu’Allah te récompense, vous récompense tous pour tout ces textes qui tombent souvent à pic et nous donne une entrée d’air frais.
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